LA QUETE IMMOBILE 1979-1992- PEINDRE A L'ECART -2006-POEMES PARIS SHANGHAI -2006.

le Carnet de route d'un peintre égaré dans la splendeur du temps. Un manuscrit daté de 1990. En première partie du blog Peindre à l'écart un entretien réalisé en 2003 de JS avec Gordon GRAY.Les poèmes réalisés à Shanghai et ceux du retour sur Paris -le tas d'esprit-2006-

Thursday, September 21, 2006

LES POEMES DE SHANGHAI ET DE PARIS.Le tas d'esprit.AOUT 2006.

POEMES DE SHANGHAI
I



MA langue tourne dans le jardin
Mon cœur bat
Entre tes mains


Le ciel me fait signe



Je regarde passer le gratte-ciel
Qui est au dessus de ma tête


J’imagine qu’il vole,
Mais c’est simplement moi qui marche


Ici dans le parc de bon matin
Je m’extasie sur la simplicité du monde

Ici je pourrais vivre cent ans si les
Moustiques ne me dévoraient pas les chairs


Une vie de bohème ne suffit plus
Là sur la table de faïence bleue
Ciselée de symboles (là ou je pose mon carnet) je vois se refléter le ciel clair,
Et les cigales que j’écoute chanter,
Accompagnent les oiseaux qui parlent une
Langue inconnue.
J’aime cette vie de lettré et de paria.


Je regarde passer les années, et je sais
Que le jour de ma renaissance ne va pas tarder


Demain, je serai peut être renommé,
Mais à l’instant je ne suis qu’un poète
Qui est à peine réveillé.


Ce que je vénère, c’est la simplicité du
Monde qui passe sous mes yeux d’enfant extasié.




La porte du destin est ouverte,
Je vois une maison et un jardin
Et les moustiques qui piquent
Qui s’écartent quand je les frappent


Dans la maison dorment
Mes deux seuls biens
Ma femme et mon fils


A travers les branches des arbres
Je vois luire le matin


Des images accompagnent mes errances



Je vois de loin un arbre et un jardin
Demains je serai où ?











POEMES DE SHANGHAI


II


Les bruits mystérieux du matin parviennent jusqu’à moi



Un enfant parle
Son père lui répond


Un oiseau me dit que je suis un curieux
- Quel curieux !
- quel curieux !

Je lui réponds
-je sais je suis comme ma mère.
Elle regardait aux fenêtres, elle
Ne pouvait pas s’empêcher.


Je sais que l’oiseau me souhaite
La bienvenue.


Une brise légère souffle dans les arbres
Elle apaise mon esprit et mon corps est
Ravit.

Aujourd’hui peut être il pleuvra.

Une petite fille avec deux nattes et deux
Rubans rose et rouge penche sa tête par la fenêtre, je vois une de ses nattes qui
Se balance ; je l’aperçois à travers le pan de linge et les cannes de bambous que l’on a suspendu au dessous de sa fenêtre.


J’ai vu l’oiseau repasser d’un vol court et régulier, je crois qu’il a regagné son
Abris.

J’aime cette vie d’errance et d’écriture.

Sous une véranda obscure j’observe à travers le verre sale des pots en gré dont certains sont à moitié cassés,
Notre vie ne vaut pas davantage.
Le chant des oiseaux l’accompagne, il la berce, mais elle est fragile et ne dure pas.
Mais qui voudrais ne pas mourir ?



En haut dans les buildings peut être au dix septième étage, j’ai aperçu une femme qui secouait ses tapis ; ici les ménagères des grattes ciels s’imaginent qu’elles vivent au ras du sol.


La voix de l’enfant dans mon dos au dessus de ma tête, fait des ronds dans mon cœur elle rebondit comme un cerf volant dans les airs, quand on tire violemment sur la corde.
La petite voix parle peut être à un père, à une mère, à un oncle à une tante, à un grand père, ou à une grande mère,car ici tout est encore intimement lié.

J’aimerais apercevoir, ce qu’il y a de l’autre côté des murs de ce jardin ; là ou j’aperçois de grands pins ; ou ces grands arbres, ces toits de tuiles rouges avec des fenêtres vertes et des murs en briques rouges, là ou j’aperçois des balcons et du linge suspendu, là ou j’aperçois des palmiers aux membrures striées.


Ici aussi dans le jardin, il y a des palmiers et des pins, des arbres aux fleurs parfumées et des grenades, mais aussi hélas des moustiques qui dévorent mes chairs.




PLUS TARD.
Sous la belle véranda, retiré dans la très belle maison, je contemple le portrait des défunts de ma famille chinoise, sous l’hôtel en bois laqué parmi les fleurs seulement achetée par Y..,
Ils vivent en noir et blanc une vie d’ancêtres, une seconde vie immatérielle.


Le minuscule oiseau au plumage orange me regarde depuis sa cage d’un air fixe et détraqué.
Il vit en cage depuis trop longtemps, pour comprendre encore ce qu’est le plaisir de voler ; seul son chant supérieur me le fait aimer.
Cet oiseau est un artiste qui répète des gammes à longueur de temps. Parfois il se met soudain à siffler des airs sublimes comme seuls les grands artistes savent le faire, cet oiseau est presque à moitié fou, mais son chant est encore intact. Je le plains et je l’admire.


Dans mon dos la télévision, acculé, je m’enfuis.



POEMES DU JOUR D’APRES


Je regarde le jardin, depuis la fenêtre de la véranda ; le soleil jette des reflets sur la pelouse. L’oiseau chanteur siffle un air qui accompagne le disque qui tourne dans la chambre à côté. Je reste sur le seuil de ma chambre à contempler le ciel ; les moustiques m’ont trop mordu les jambes, elles sont devenues comme des navets. Je suis au supplice.
J’attends en écoutant du jazz que revienne Y .., elle est allé accompagner Lucien chez un ami Tien leu qui a douze ans, pour qu’ils s’amusent ensemble. Elle doit m’amener chez le coiffeur. En Chine, je suis comme un enfant, car je ne parle pas la langue. , je n’en ai plus ; je vais pour me faire masser par de jeunes femmes en blouse bleue émeraude.









Cet après midi, je dois intervenir avec DADA. Un tas d’esprit de deux mètres m’attend dans une rue de Shanghai.
C’est le cadeau d’anniversaire que je me suis offert, car aujourd’hui, j’aurai cinquante huit ans à exactement dix heure trente, l’heure ou je dois aller chez
le coiffeur me faire masser.





Demain nous repartons pour la France, j’ai toujours peur de prendre l’avion, mais a présent, je suis habitué à ma peur,elle me paraît un peu moins repoussante.



A Shanghai il fait chaud aujourd’hui, il ne pleuvra certainement pas,comme les jours précédents.
Je vais pouvoir intervenir sur le tas d’esprit sans crainte de la pluie, je dois seulement craindre la chaleur et peut être la foule.






RETOUR EN France

DADA FLAYER
A Apollinaire.


Vole DADA
VOLE DADA ET POST DADA
Dans les airs vole vers l’occident.
Retour au bercail ?
Dada rentre à la maison



La belle hôtesse de l’air a des airs
De femme fatale
Elle a de gracieuses petites oreilles , elle a le sourire de ce fauve sensuel que j’aimerais incorporer dans mon cirque imaginaire.
Elle serait mélomane et masseuse, elle glisserait contre moi ses longues jambes baguées de soie, et sa main fine comme les ailes des libellules caresserait mon front soucieux, à cause des turbulences.

Elle n’est pas trop jolie, mais elle possède à mes yeux une qualité supérieure, à toutes les autres, elle à du chien ;
Elle a le regard qui mord et son sourire est dévorant.
Dans une autre vie je l’aurais épousée.


DADA file vers l’occident à la vitesse de l’avion –AIR – CHINA .
Les couvertures bleues qui réchauffent les passagers, me font penser aux ponts des bateaux de croisière, plus qu’à l’avion.

Trois enfants chinois qui avaient une pancarte au cou, car ils voyagent seuls, se chamaillent sans vergogne à mes côtés ; le plus jeune me bouscule, mais il est très gentil, il est encore comme un enfant ; il ma dit très fier en Chine j’ai déjà neuf ans en France seulement huit.



De retour sur Paname, je ne sais ce qui adviendra de ma vie, je retomberai probablement dans la routine, et je m’enfoncerai en imagination, vers des contrées héroïques baignées par des feux incandescents, je serai repris par la même ivresse d’homme fait.



Dans l’avion un enfant vient d’avoir un malaise, les hôtesses l’ont étendu sur deux sièges, deux médecins français sont intervenus.

Il est 10H25 heure de Paris, 16H30 heure de Pékin.
Nous sortons à peine du désert de Gobie ; sur l’écran je vois s’afficher les steppes vertes de Sibérie, nous sommes à 60000 kilomètres de Paris.


Je m’ennuie.




Les deux enfants qui dorment prés de moi penchent sur le côté, ils ressemblent à des Bodhisattvas, ils ne parviennent pas à me faire oublier le temps qui a du mal à passer.

Je contemple ma vie de loin, à travers les hublots de l’avion qui souvent s’ouvrent et se ferment, en jetant une clarté digne des grands feux de DANTE ;
Dans la rangée près des hublots, je regarde Y.. qui sommeille, elle tient les jambes repliées de son fils qui est aussi le mien dans ses mains, le saint esprit les Bénits DADA est avec lui.






DEBARQUEMENT PARIS AEROPORT CHARLES DE GAULLE

Je n’ai pas revu la belle hôtesse lorsque nous avons franchit le seuil de l’avion pour descendre sur la terre d’île de France. J’en étais désolé.
Mais elle m’avait gratifié quelques instants auparavant d’un sourire angélique digne d’un fauve post-surréaliste, fauve que j’aurais bien caressé quelques instants pour électrocuter mon cœur de poète égaré.


Nous étions rentré en France DADA se demandait s’il allait s’ennuyer quand il a vu le visage crispé d’un couple qui attendait ses bagages depuis une demi heure dans un des halles du très vieille aéroport ; Charles de Gaulle il est vrai est mort depuis longtemps. A Pudong la chine qui s’éveille en possède un plus grand, mais il ne porte pas encore le nom d’un dirigeant. Seules leurs calligraphies ornent les frontons du grand aéroport.
Le couple ronchon que j’avais vu, n’arrêtait pas de critiquer la Chine, je me demandais si la France avait encore en elle assez d’esprit pour honorer DADA.







A PARIS

J’ai repris la vie malheureuse et magnifique qui est la mienne sur les marchés.
Je me dit qu je dois m’arrêter de me vendre comme une prostituée sur les marchés de l’art courant, cela fait bientôt huit années que je bourlingue sur le pavé.
Je suis un artiste de la rue, je fais le trottoir, et j’ai aussi des collectionneurs, mais il fut attendre parfois longtemps, avant d’en voir un débouler.


J’ai décidé de lancer des grands projets avec DADA, je voudrais hisser dans les rues du monde entier des cônes POST DADA, pour m’amuser.
Je dois trouver des sponsors, c’est le plus difficile.
Je suis comme Christo à ses débuts, j’ai seulement les maquettes, mais je n’ai pas une femme comme lui qui a de l’argent pour me seconder.
L’art n’a rien à voir avec le talent, l’art à tout à voir avec l’argent.
Ben qui spécule aimablement sur le tas d’esprit le sait bien, il n’y a pas d’artistes de talents sans argent. L’argent est la clé de la notoriété, du succès de la gloire.
L’anti – art est une foutaise, seul l’art qui fait du fric intéresse le bourgeois, l’artiste qui a soif de notoriété de gloire et de succès se jette à plat ventre devant le bourgeois à cause de son fric. L’anti-art dans tout ça c’est de la foutaise, c’est trop difficile à mettre en bourse.







LE TAS D’ESPRIT

J’ai par déception envoyé à BEN plusieurs mots d’insultes.
J’avais cru qu’il allait nous inviter à une grande fête artistique avec ses tas d’esprits, mais au final rien ne s’est passé, il n’a pensé qu’à son ego et à ses tee-shirts.
Il ne mérite pas mon amitié, c’est pourquoi je le lui ai simplement retirée.







fin





s

Monday, April 17, 2006





NORMAN GRAY
J.STARCK
ENTRETIENS

PEINTURE 2000

Peindre à l'écart
































LA CHINE

LES METISSES

Les SERIES BLEUES

LA SERIE SQUATTING

LES SUITES PARIETALES

LES SUITES DE PORTAITS



PREFACE



J'ai rencontré JS Jean Starck Vers le milieu des années quatre vingt dix. On me l'avait présenté comme un des piliers de la nouvelle génération des créateurs alternatifs, il était considéré alors comme un des chef de file du mouvement urbain des années quatre vingt, celui issu des squats d'artistes . Ce mouvement qui suscitait l'hostilité, et dont on parlait régulièrement en plus ou moins bon termes, avait suscité mon intérêt . Je m'intéressais à ces courants nouveaux qui vivaient en marge de l'art officiel. . Je me demandais ce que ces jeunes créateurs pouvaient bien avoir à dire
Quand j'ai eu l'occasion de rencontrer JS pour la première fois, il vivait encore " sur son lieu alternatif" c'était une ancienne Malterie située en banlieue Sud de PARIS la friche urbaine était autogérée, elle s'appelait le CAES ( centre autonome d'expérimentation social) c'est là que nous avons fait connaissance et sympathisé. Il y avait à cet endroit situé en bordure de Seine à trente kilomètre de Paris , de très grand espaces ont y trouvait réunit une foule de gens très divers qui se livraient à des activités artistiques, mais pas uniquement il y avait aussi un garage, une imprimerie, une entreprise de construction de murs d'escalades, des salles de spectacles et au moins deux bar. C'était une sorte de ruche post moderne , "un village alternatif "occupé par des artistes excentriques et par des gens qui avaient foi en une sorte de société utopique . Lorsque j'ai fréquenté le lieu , j'ai eut de la chance il était dans une période de florescence, il était extrêmement vivant très créatif en pleine effervescence. Plus tard vers la fin des années quatre vingt dix , c'est à dire quelques années après mes premiers passages, il est devenu moins exubérant et même quasiment invivable beaucoup d'artistes et beaucoup de militants utopistes l'avaient fuit dont JS ; ils ne pouvait plus travailler sur la friche sans risques , elle était devenu trop dangereuse . Les lieux alternatifs connaissent aussi leurs périodes de faste et de décomposition; ainsi la vague de violence urbaine qui déchira les banlieues en France durant la deuxième décennie des années quatre vingt dix n'épargna pas la base artistique expérimentale, elle faillit même s'effondrer . Aujourd'hui pourtant le lieux existe toujours. Personnellement j'ai cessé de m'y rendre , bien que Pawlowsky et Shurder deux amis de J.Starck deux artistes que j'apprécie y résident encore d'une façon ponctuelle. Les deux ex fondateurs (avec JS ) D'art - Cloche (le mouvement qui donna naissance aux squats d'artistes ) ont résistés à la vague de violence et de décomposition qui s'abattit sur le lieu, ils créent toujours conformément à la tradition qu'avait instauré le groupe Art - Cloche à son origine qui consistait "à créer en toute liberté " sur ces nouveaux lieux de poétique urbaine et d'utopie que sont les friches industrielle". Jean Starck quand à lui à rejoins , après son dernier séjour mouvementé sur la friche début quatre vingt dix huit (huit mois après la naissance de son fils) une cité d'artiste , située à Evry pas très loin de l'ancienne base alternative ; il vit en compagnie de sa femme et de son fils dans un espace relativement plus restreint que celui qu'il occupait à l'époque ou je l'ai rencontré, mais cela ne semble pas vraiment l'affecter.
J'ai réalisé les divers entretiens qui m'ont permis de réaliser ce catalogue en plusieurs étapes, .La première sur ce nouveau lieu date de 1998.Je n'ai pas utilisé toutes les notes que j'ai pris à chaque occasion, j'ai seulement opéré une sélection sur celle ci, avec l'accords du peintre.
Avant de conclure cette préface me reviens en mémoire une vision que j'avais gardé de La première vie artistique que j'avais entrevu de JS à l'époque ou je l'avais croisé dans son atelier de Fabrique d'art post industrielle sur la friche poétique urbaine du Caes. Le contraste de sa vie et de ses travaux me paraît aujourd'hui surprenant .Cela en fait me fait songer surtout à un vieux dictons oriental qui dit de me méfier des apparences , car les multiples facettes d'un même homme sont comme autant de perles disposés sur un collier, certaines brillent d'avantages que d'autre, mais il est difficile en fait de savoir laquelle et la plus précieuse, car ce que l'on voit de loin , ce ne sont pas les perles , mais le collier. De même pour apprécier l'œuvre d'un artiste il faut la voir avec un certain recul, si on veut l'apprécier dans sa totalité. Ainsi il faut garder à l'esprit que ce que nous voyons dans ce document que nous livrons ne concerne qu'une tranche de la vie d'un créateur qui œuvre depuis au moins une bonne vingtaine d'années. Comme il arrive à l'approche de la cinquantaine ce qu'il donne à voir n'est rien d'autre qu'une suite de perles issue d'un collier qui en comporte déjà plusieurs dizaines d'autres . Nous espérons un jour pouvoir montrer bien plus si l'auteur nous y autorise. Comme il nous garde toujours en amitié nous sommes plutôt optimiste, ce jour viendra, en attendant nous devront nous contenter de ces légers entretiens que nous livrons et de ces œuvres de périodes post - alternatives qui possèdent déjà avouons quand même, par certains côtés même si leur auteur en doute encore l'éclat et la beauté des œuvres de la maturité.


Norman Gray
New -York
Août 2003.



I




Norman Gray. De père américain et de mère Française Normand Gray à vécu à Londres en Australie et aux Etats Unis pendant de nombreuses années, aujourd'hui, il vit principalement à Paris et à New- York. Il est diplômé de l'Université de Harward. Auteur d'une série d'ouvrages sur la peinture occidentale, et particulièrement sur les avant gardes plastiques, il est aussi musicologue Il s'est intéressé de près au travail de John Cage, et au groupe fluxus. Il prépare en collaboration avec l'auteur Américain Irvin Neux une vie imaginaire du célébre compositeur Williams Combe ( 1930 - 1970 ) ami de NaT Tate artiste peintre américain (1928 - 1960) récemment redécouvert par l'écrivain William Boyd.













LA CHINE


TOUS LES TEXTES INTERCALAIRES SONT DE NORMAN GRAY.



La Chine aura joué dans la vie de JS un rôle essentiel, vers la fin de la quarantaine. Sa route a cette date, a croisé celle d'un peintre chinois qui lui a présenté celle qui allait devenir sa femme, une universitaire chinoise originaire de Shanghai. Il s'est marié avec elle en 1993, en 1997 elle lui donne un fils qu'ils ont prénommé Lucien (Ein Le en chinois - Joyeux - tranquille) . Depuis sa vie est jalonnée par ses rencontres avec la Chine. Son dernier voyage en Chine date de l'an 2001.



Norman CRAY: Lorsque nous avons discuté la dernière fois de la façon dont ont allait s'y prendre pour réaliser concrètement ce catalogue , tu ma dit que tu n'avais pas d'idée précise sur le sujet , puis subitement tu t'est mit à me parler de la Chine. Je me suis demandé alors si nous ne devions pas commencer par là par parler de la Chine je veux dire .

Jean STARCK: Je t'ai parlé de la Chine, car je venais d'y faire un séjour prolongé quand on s'est revu .


Norman G: Tu es resté la plupart du temps à Shanghai je crois; qu'à tu fais à Shanghai …à part peindre si ce n'est pas vraiment indiscret?

J S:

Il n'y a rien de secret. J'ai passé la première partie de mon temps (six mois) à me balader dans la banlieue de Shanghai, et les second six mois je les ai consacré à explorer le cœur de Shanghai. J'écrivais presque quotidiennement je tenais un journal de bords de mes explorations, cela me changeais de la peinture . Comme la première exposition que j'avais fait , n'avait pas vraiment marché, je ne me voyais pas produire une quantité industrielle d'œuvre , je vivais dans un appartement assez clean en compagnie de Yi et de Lucien mon fils âgé de cinq ans ; j'avais aménagé une partie de la véranda en atelier. J'ai réalisé dans cet appartement une cinquantaines de pièces , presque uniquement des suite de la série " La métisse". j'ai arrêté de travailler lorsque je me suis aperçu que je commençais par accumuler des pièces qui risquaient de ne pas se vendre.
Dans cet appartement j'ai pensé à un moment à peindre des avions, car nous étions situé près d'un aéroport et il y en avait de magnifiques qui passaient à proximité. Je passais une partie de mon temps à les observer, certains rasaient presque les toits des immeubles j'étais fasciné, fasciné par les avions mais aussi par la manière de se comporter des chinois, je me trouvais assez bien finalement dans cette banlieue éloignée en grande partie de tout ce que j'avais connu en France , mais j'ai failli aussi y mourir d'ennui, car je ne parlais pas la langue du pays.

Norman G:

Comme peintre est ce que la Chine à un peu influencé ton travail, ou bien pas du tout?



J S:

A vrai dire, j'ai reçu quelques influences et je ne les ai pas exploitées comme j'aurais pu le faire . J'ai tenté au début que je me suis mis à peindre de faire apparaître des impressions que j'avais reçu de la peinture chinoise, car j'aime beaucoup certains peintre chinois qui peignent " de la peinture chinoise" c'est à dire quelque chose qui ne ressemble en rien à la peinture occidentale Il en est un entre autre que j'aime particulièrement, c'est TCHI PAI TCHI. J'ai donc essayé au départ de m'inspirer du trait primitif poétique et exact de ce peintre, et j'ai conservé à Shanghai une série de peintures noir et blanc issue de cette manière. Mais très vite je me suis aperçu, qu'il était assez dangereux de travailler dans cette direction, en Chine surtout ou les regards que les chinois projettent sur leur propre peinture sont sans appel. Les peintres chinois qui sont vénérés comme des maîtres, peuvent être copiés, mais si on le fait il faut savoir qu'on prend le risque de n'être pas pris au sérieux, pas plus qu'on ne rend au sérieux en France un japonais qui peint comme Renoir. J'ai fait des tentatives d'assimilation de la peinture chinoise que je n'ai pas poussé très loin , car je gardais à l'esprit que c'était mal perçu par les chinois qui pouvaient y déceler rapidement toutes sortes d'imperfections. J'ai réalisé quelques versions chinoises de la métisse en les insérant dans une suite d'écritures ou prédominait ma manière occidentale de faire , comme ça il n'y avait pas de confusion possible, sur les emprunts , c'était des clins d'œil que je faisais en direction de la chine.



















Norman G : Comment a tu fais pour te débrouiller en Chine au niveau de la peinture, puisque tu ne parlais pas le chinois. Je sais que dans une ville comme Shanghai on communique aussi en anglais, mais ce n'est pas toujours aussi évident, je me souviens d'un séjour que j'ai fais à Pékin ou j'avais certaines difficultés bien qu'étant de père Américain à trouver les bons interlocuteurs, il ne suffit pas toujours de trouver quelqu'un à qui parler, il faut aussi et cela s'applique particulièrement à la chine être introduit ans un réseau amicale pour pouvoir réaliser des choses.

J S:
Tu as raison de souligner cet aspect il n'est pas négligeable. Tu le sais puisque tu la connais bien, je suis marié à une femme qui est née et qui a vécu en Chine pendant presque trente ans, sans elle je n'aurais jamais pu pénétrer en si peu de temps la société chinoise. C'est surtout grâce à son réseau de relation que j'ai pu exposer au début, car je ne disposais pas de galerie et donc d'un réseau opérationnel ou encore d'un agent comme c'est souvent le cas pour des artistes accrédités, je travaillais en solo. Pourtant les choses ne furent pas pour autant toujours faciles; la première exposition que j'ai fait à Shanghai, demeura incertaine jusqu'à la veille de l'expositio alors qu'elle était théoriquement prévu depuis plusieurs mois. J'avais l'impression que l'ami de Yi qui m'avait promit cette expo m'avait amené en bateau. Et puis au dernier moment, il ma trouvé l'espace. Cette exposition avait lieu dans une grande foire Internationale d'Art, j'ai expos , dans l'espace d'un peintre chinois LI LEI qui a bien voulu se serrer pour m'accueillir sur son stand, car l'ami de Yi qui connaissait les organisateurs de l'exposition n'avait pas pris le soin de les avertir assez tôt de ma présence, il a donc fallu qu'il se débrouille pour me faire passer dans les lieux au dernier moment. C'était une sorte d'épreuve , j'avais tout qui était prêt , mais j'étais encore incertain de pouvoir exposer. J'avais envoyé des communiqués de presse pour annoncer qu'un des fondateur D'AC le mouvement qui est à l'origine de la création des squats d'artistes à PARIS était présent à Shanghai, j'avais travaillé et envoyé à la presse en traduction chinoises anglaises et françaises des interviews imaginaires qui parlaient du mouvement comme le faisaient les surréalistes à leur époque , je disais que je résidais dans une chambre d'hôtel à Shanghai et que les œuvres que j'avais réalisé n'étaient pas aussi brut que celles que j'avais pu construire durant la période héroïque du mouvement, car j'avais peur de salir les moquettes de l'hôtel. ou je logeais; naturellement je m'amusais beaucoup à fabriquer des éléments de ma propre légende. Pour illustrer mes articles en plus des œuvres, j'avais pris une photo de moi devant la célèbre avenue du Bund; je m'étais photographié avec le chapeau que je portais sur la tête à cette époque qui me faisait ressembler ma dit Yi au premier ministre chinois de l'époque, pour ma part je pensais porter le même chapeau qu'un flic d'une série américaine célèbre, naturellement j'étais plutôt déçu de ce rapprochement avec un cadre du régime à la mine froide; cette photo insolite à été servit plus tard dans quelques journaux pour illustrer des articles; comme quoi on n'est pas toujours bien inspiré de choisir soi même ses chapeaux .J'avais fait imprimer un carton qui représentait la métisse , telle que je l'avais imaginée si je l'avait rencontrée vivante dans la rue. Ce carton et à bien y réfléchir ce qui me reste de plus intéressant sur cette expo.
D'ailleurs j'ai passé dans cette exposition les trois quart de mon temps à dessiner au dos de la carte postale, pour de jeunes chinois qui semblaient l'apprécier et qui n'avaient naturellement pas les moyens d'acheter des tableaux , je vendais la cartes postales à 1 E . J'en ai dédicacé des centaines par amitiés pour ce public qui semblait ne jamais se tarir car la Chine est impressionnante au niveau du nombre. Certains manifestaient un tel candide enthousiasme pour le peintre occidental que j'étais que j'avais presque fini par me prendre pour une star. J'ai arrêté de me livrer à ces séances de dédicace lorsque j'ai compris que je n'aurais jamais assez de cartons pour répondre à la demande, et que je mourrais d'épuisement sans jamais parvenir à satisfaire tout le monde


Norman G:
L'enthousiasme du public chinois pour tout ce qui vient d'occident,, est ce qui m'avait frappé le plus lors de mon dernier séjour en Chine. Ce qui m'avait particulièrement frappé, c'était la candeur avec lequel les chinois absorbaient presque sans distinction et avec une grande facilité dans les grandes villes surtout toutes sortes de bouillies préparées à la sauce occidentale. Le désir de s'échapper d'une Chine conventionnelle aux valeurs stéréotypées agite une partie de la jeunesse chinoise, il se superpose au désir de consommation calqué sur celui de la société occidentale , mais y a t'il place encore en Chine pour une sorte de pensée issue de la grande tradition philosophique chinoise?


JS:
C'est une question à laquelle je suis incapable de répondre. J'ai souvent constaté c'est vrai qu'en Chine , la culture traditionnelle chinoise intéresse plus ( en apparence) les occidentaux que les chinois eux même. Mais c'est la même chose pour les occidentaux, combien s'intéresse à l'antiquité et combien d'entre eux prennent les classiques Grecque comme référence ? En fait la Chine au fond d'elle même, est encore totalement imprégné de culture traditionnelle, même si la chine communiste est passé par là, et qu'elle s'est attaqué aussi au confucianisme. les grandes valeurs sont toujours il me semble véhiculées par la famille qui constitue toujours une base essentielle de développement. La plupart des jeunes ménages, font un enfant mais ils le laisse les premiers temps aux grand parents qui se chargent de l'élever pendant ce temps le jeune couple travail ou bien il fait la fête ; pour moi c'est un signe qui ne trompe pas; en fait je crois bien que la société chinoise reste très proche de ses racines traditionnelles, même si en apparence elle aspire au changement, et à plus de confort. Quand à savoir ce qui reste de la grande tradition philosophique chinoise, c'est plus difficile à appréhender.

Norman G:

Pour passer à un autre sujet, j'aimerais savoir, si lorsque tu as exposé la seconde fois, (c'était je crois dans un quartier populaire de Shanghai) tu a rencontré des difficultés administratives particulières, car on ma dit qu'en chine, l'administration du parti avait encore le pouvoir de censurer les artistes.


J S.

J'ai eu la chance d'avoir échappé à toutes les contraintes administratives du fait que j'ai été très tôt pour cette deuxième exposition entouré par des amis, qui étaient tous chinois. Cela ma permit d'échapper à tous les obstacles que l'on peut rencontrer en temps normal pour une exposition qui aurait du passer devant une commission de contrôle ou de censure comme on voudra . Je ne veux pas dire que mes amis chinois n'aient pas rencontrés de difficultés pour me faire rentrer dans le circuit artistique de Shanghai, ils s'y sont prit de telle manière que cela a été possible en contournant tous les obstacles administratifs normaux.. Je n'ai donc pas connu de censure. En fait comme je n'avais pas de message politique manifeste à délivrer je n'ai pas eu de problème. Pourtant l'organisateur qui m'avait aidé lors de la première exposition s'inquiétait, lorsqu'on lui a traduit mes communiqués et mon CV de savoir si je pouvais lui occasionner des ennuis, car il craignait que je puisse faire une intervention contestataire. La peur de déplaire aux autorités politique du pays existe toujours en Chine. Un employé de la société ou était employé ma femme ma même mis en garde en voyant que je travaillais sur des collages de journaux ou figurait de temps en temps le portrait de Mao, il ma conseillé de ne surtout pas défigurer les représentants du parti cela risquerait de m'attirer des ennuis me disait il. Yi ma femme riait de ses déclarations, elle pensait elle que c'était là des peurs hérités d'une époque ancienne, les nouveaux dirigeants étaient capables de plus de discernement que les anciens me disait elle. Pour ma part je me suis donné comme ligne de conduite en Chine de n'exposer que des choses qui ne puissent pas nuire à ceux qui m'entouraient et qui m'avaient aidés lors de mon séjour; c'était avant tout une marque de politesse et de respect à leur égard. D'ailleurs, les gens que je fréquentais en Chine n'appartenaient pas à des réseaux contestataires ou simplement underground .J'aurais bien aimé rencontré des artistes underground à Shanghai, mais je n'en ai pas beaucoup trouvés .Le seul artiste que j'ai rencontré qui pouvait s'inscrire dans cette mouvance, était un architecte d'origine Taiwanaise, il vivait au bords du fleuve dans un immense loft qu'il avait aménagé, il militait pour la restauration des friches urbaines, ses espaces étaient magnifiques, mais il paraissait très isolé, et les autorité paraissaient se méfier de lui; il est vrai qu'il était très critique par rapport à l'emploi du marbre dans toutes les nouvelles construction pratique systématique à Shanghai , il trouvait ça un peu débile ; en fait son discours alternatif sur la restauration des friches avait du mal à passer.























LES SERIES BLEU
Le processus d'engendrement.






Les séries bleues ont commencées par voir le jour dans son ancien atelier des bords de seine, je pense que c'était aux environs de 1997 qu'il a commencé par les mettre à jour. Au départ il s'étais surtout inspiré d'une série primitive en teinte monochrome blanc sur fond gris qu'il avait réalisé sur du carton, des espèces d'esquisses préparatoires pour des toiles futures qui n'ont jamais prit selon lui toute l'ampleur qu'elles auraient mérité de prendre ( entretiens Juin 2003). Il travaillait sur des motifs inspirés de scènes primitives imaginaires. Il les avait abandonnés, un an ou deux puis le désir le les reprendre l'avait saisit. A ce moment il n'avait peut être pas l'intention de travailler ces scènes en bleu, ma t'il dit mais comme souvent dans le processus de création des choses surgissent presque à son insu et ce sont elles qui donnent la direction aux choses.
Le bleu n'est pas une couleur incidente, chez lui, il a toujours eut un la tentation d'utiliser cette couleur. Il a peint une grande quantité de travaux à l'époque d'Art -Cloche qui était déjà des Jocondes sur fond bleu .Il a également réalisé des installations en empruntant uniquement la couleur bleu, c'était à ses débuts au 6 rue d'Arcueil, il avait peint une chapelle Plus tard il a utilisé lors de certains happenings cette couleur , comme symbole physique; une de ses première performance, réalisé dans le squat du 6 rue d'Arcueil en 1983 s'appelait hommage tardif à Yves Klein. Le bleu a donc joué un rôle essentiel dans sa vie d'artiste, presque à son corps défendant d’ailleurs, car il me le répète pour que je le comprenne bien, il est le premier étonné de voir sortir ces choses. Elles surgissent de lui comme si c'était un autre que lui qui les avait conçu. Il considère qu'il n'est pas intégralement responsable de sa création, elle lui tombe souvent sur la tête presque à son insu. Il dit qu'il est bien obligé d'admettre que c'est là un phénomène étrange, car si il possède dans l'instant l'illusion de contrôler sa création, (lorsqu’il peints il imagine toujours que c'est par un acte délibéré) il est bien obligé de constater qu'une partie d'entre elle surgit par des voies qui semblent toujours indépendantes de sa volonté. Il me dit encore que le plus difficile dans sa vie d'artiste peintre aura été d'accepter que ce qui sort de ses mains lui appartienne en propre et marque ainsi le reflet de son identité profonde ou même superficielle, il lui faut parfois beaucoup de temps pour accepter que ce qui sort de lui fasse partie de son univers propre. Parfois il aurait aimé concevoir une œuvre bien différente de celle qu'il voit surgit, mais cela s'avère presque toujours impossible, car lorsqu'il imagine une œuvre idéale, il en voit surgit toujours une autre à la place. Il a donc presque cessé de vouloir construire une œuvre idéale. Ce qui surgit de ses productions artistiques lui donne souvent le sentiment qu'une œuvre se construire à son insu dans son dos qu'il ne fait lui qu'assister à son développement. La plus grosse difficulté, pour lui c'est de voir surgir des parties de sa création qui lui paraissent presque totalement étrangère ; à ce moment là; il éprouve dans les premiers instants de leur apparition un sentiment de perdition, il ne sais pas à quoi rattacher ces œuvres , elles ne lui sont pas familières ; leur apparition le déstabilise , le perturbe intérieurement . C'est peut être une des raisons qui le pousse à procéder à un travail en séries. Les séries l'obligent à se familiariser avec de nouvelles formes d'écritures qui lui semblent inconnues. En poussant ces séries assez loin, il produit des efforts pour s'assimiler ces espèces de visions étrangères qui surgissent en lui, c'est sa façon de les domestiquer ; au bout d'un certain temps il commence par admettre l'idée de leur existence, alors les œuvres qui surgissent lui paraissent moins étrangère, il s'est familiarisé a leur contenu. Au bout d'un certain temps, il s'aperçoit même qu'il s'est habitué à leur présence. Plus tard il s'aperçoit, que ces œuvres s'échappent de lui elles semblent même pour certaines vouloir disparaître ; d'ailleurs elles disparaissent souvent pendant un temps parfois très long (pendant plusieurs années), elles disparaissent tout aussi mystérieusement qu'elles étaient apparues, plus tard (parfois dix ans plus tard) il les voit resurgir toute pareille à elle même. Il sait qu'il doit alors les accueillir en lui avec résolution, car les ont de nouvelles choses à lui dire. (entretiens du 7juin 2003).


- A t'entendre parler on a l'impression que pour toi l'activité créatrice provient d'une source mystérieuse qui est extérieure à toi, qu'elle échappe à ton entendement et que tu ne peu en rien orienter son développement. Je ne t'ai pas toujours entendu tenir ce discours.

JS :
- En fait je le tiens depuis peu. Pendant très longtemps j'ai été persuadé d'être le seul auteur de mes créations, bonnes ou moins bonnes. A présent je considère que je ne suis pas le seul à œuvrer. Il y a probablement et c'est le plus singulier un programme génétique en moi qui ordonne ma création. Je dis cela en riant mais je n'en pense pas moins. Nous sommes tous porteur d'une sensibilité en provenance du passé, elle est en partie inscrite dans nos gènes elle s'est constituée aussi pour partie grâce à l'apport d'imagination qui nous est propre. Pour ma part par exemple lorsque je me retourne pour observer ma création artistique, je suis plutôt étonné de voir le caractère qu'elle a revêtu. Elle me représente explicitement, mais je suis étonné de la découvrir telle qu'elle est, est ce bien moi qui ai faire surgir tout cet univers là? Ces choses qui sont sorties de moi, me semblent aussi appartenir à quelqu'un d'autre qui n'est pas moi. Par exemple cette série pariétale au caractère violent sombre et coloré qui a commencé à surgir lorsque j'ai entrepris ce que j'appelle ma quête des origines vers le début des années quatre vingt, d'ou venait elle? Elle provenait en partie j'en avais implicitement l'impression d'une lignée de sensibilité que j'avais peut être hérités de mes ancêtres ( tous inconnus) car c'était une partie de mon patrimoine génétique qui semblait parler à travers ces peintures. Il y avait un goût pour la rudesse, pour le dépouillement pour la beauté naturelle pour la beauté simple immédiate et brutale de la vie qui ne tenais pas seulement au simple fait de ma sensibilité; je sentais s'agiter derrière moi une lignée d'être humains. Naturellement il m'était impossible de les identifier, mais je savais qu'ils existaient, car ils avaient exister avant moi, ils avaient tenu leur place dans le maillon de la gène génétique qui avait contribuée à faire de moi ce que je suis. J'étais sans doute porteur d'une vision du monde qu’ils m’avaient transmit à mon insu. C'est probablement dans le sens là qu'il faut entendre les choses quand je t'ai dis récemment que j'avais le sentiment que ma création m'échappait.
- Les processus de création sont mystérieux mais pour toi ils sont porteurs d'une certaine logique.
- JS : Les processus liés à la création sont tous assez mystérieux. J'essaye de faire de mon mieux lorsque je travail, je peu aussi avoir le sentiment de faire mal les choses dans certaines périodes, car intuitivement je peu avoir le sentiment de me perdre ou de faire preuve de moins de rigueur. Mais il y a toujours une part obscur du travail que je ne peu pas maîtriser. En même temps, cela ne veut pas dire que je n'en ai pas la tentation. Je crois même que la sensation d'exister pour le peintre joue avec cette tentation, le peintre ne peut pleinement exister que parce qu'il porte en lui cette tension, qui consiste à vouloir aller toujours plus en avant à rendre les choses toujours plus exactes toujours plus juste toujours plus claires malgré la part d'obscurité qui entoure son travail; c'est le défi du peintre, il n'est jamais clos ,toujours en demeure de s'ajuster à de nouveaux horizons à de nouveaux défis.


- Pour en revenir aux séries bleu, depuis combien de temps les travailles tu?


- JS : Le temps importe peu j'ose à peine parler de ces séries car je les trouvent encore bien peu abouties. Je ne leur consacre pas assez de temps. Pour qu'elles prennent toutes les ampleurs, il faudrait que je travail d'une façon régulière dessus il me faudrait un grand atelier ou je puisse ne faire que ça travailler sur elle. Elles croîtraient mieux si je pouvais évoluer dans un univers entièrement bleu. Les circonstances actuelles font que je ne peu travailler que par à coup, et dans un espace saturé. Ce n'est pas la meilleure façon de les engendrer. Le miracle à limite c'est qu’elles puissent croître et voir le jour même dans ces conditions plutôt défavorables.
























LES METISSES

Processus invention, points de repères

On pourrait croire que la série des métisses est sortie toute faite de sa tête, car il nous dit souvent qu'à la base de la création il y a un processus inconscient qu'il ne maîtrise pas et qui lui échappe. Mais si on l'observe travailler on s'aperçoit qu'il provoque d'une façon presque méthodique le surgissement de certains procédés et l'apparition de certaines formes. Naturellement les formes lui échappent , mais dans le processus intime de création, certaines formes apparaissent et par forcément par hasard, elles apparaissent parce qu'il s'est donné du mal pour les faire surgir. Ce long travail d'improvisation qui consiste en essais en ratures et en esquisses souvent en reprises donnent naissance à des suites qu'il nomme " des suites inventées " parce qu'elles génèrent des structures insolites et donnent naissance à des formes nouvelles qui apparaissent parfois à l'improviste parfois après un long processus de fermentation. J'ai assisté à la genèse de son travail sur les métisses, et d'une certaine façon, je peu le comprendre lorsqu'il me dit que beaucoup de choses surgissent chez lui presque sans qu'il le veuille, par hasard ou derrière son dos, mais il oublie de noter au passage qu'il est lui même catalyseur, il ne reste pas les bras ballant à attendre que les choses viennent, il cherche à les faire venir et à les provoquer.

Je me souviens de t'avoir rendu visite à l'époque ou tu travaillais sur une série qui appartient à l'origine à cette suite que tu as intitulée depuis " cycle des métisses". Ce que tu cherchais étais assez éloigné (en apparence) de ce qui tu as mis à jour au final, c'est à dire cette forme épurée, un peu stéréotypée, qui structure la métisse.

- JS : C'est vrai je cherchais dans une direction qui était en apparence à l'opposé de la structure épurée, et simplifié que j'ai finalement réussit à mettre à jour sous le terme générique de " la métisse". Je n'ai pas conservé à cent pour cent la mémoire du processus intime qui ma conduit à vouloir mettre à jour une forme nouvelle, mais j'ai bien eu le désir d'en mettre une à jour à ce moment là. Je me souviens que j'avais le désir pressant de faire apparaître partant du lieu ou j'étais une nouvelle vision de la réalité. Car en fait il s'agit pour moi, souvent de ça au départ, le monde dans lequel j'évolue m'apparaît soudain terne, il ne me plaît plus, je dois alors me mettre en marche, faire un effort pour en trouver un nouveau plus conforme à mes aspirations. Voir le monde différemment n'est pas facile cela exige un certain travail sur soi. Mon désir de transformation à cette époque était à la fois érotique sensuel autant que qu'intellectuel et spirituel, je voulais tout en restant sur place dans mon atelier de banlieue reconsidérer ma vision du monde en crée une nouvelle, redécouvrir un pan de réalité en une sorte de voyage immobile éclairant. Je venais de lire une biographie de Gauguin lorsque ce désir de changement ma possédé. Et ce n'est pas un hasard si au départ j'ai tenté de travailler sur un nu inspiré d’une jeune femme à la peau sombre que Gauguin avait peint.
J'imaginais que le lieu où je vivais s'était transformé. J'imaginais que les platanes et les marronniers qui entourait la cité d'artiste ou je vivais étaient des arbres sortis de la jungle j'apercevais une grande lumière invisible une lumière solaire derrière les êtres et les choses. J'imaginais l'atelier dans lequel j'étais beaucoup plus grand qu'il n'était, je peignais un corps nu au milieu d'un espace tropical. J'avais la sensation mais aussi le besoin de créer en moi ce dépaysement radical. Je n'apercevais l'espace ou je vivais qu'à travers le prisme d'une vision tropicale héritée en partie de celle de Gauguin, lorsque je traversais ma ville, je n'apercevais plus que des femmes noires aux tuniques de couleurs éclatantes , car il y en avait beaucoup dans la ville ou je vivais. Je pouvais avoir la sensation par instant de me trouver dans une ville brésilienne, alors que nous étions en banlieue parisienne; c'était l'été la chaleur et l'éclat du soleil m'autorisait à développer de telles visions empreintes d'exotisme, j'effectuais un voyage imaginaire au fond d'un monde tropical et primitif éblouissant.
J'ai donc mis à jour une première série d'esquisses qui traduisaient mes visons du moment, la plupart ont été réalisées sur du carton ou sur du papier. Elles étaient toutes imprégnées d'ue système d'écriture hérité du tatouage que j'avais déjà utilisé sur une autre série de travaux primitifs quelques années auparavant. Ma vision était ciselée de l'intérieur par une sorte de sculpteur qui avait des affinités profondes avec celle des Indiens maori. Pourquoi, Maori peut être à cause que leurs tatouages m'ont toujours impressionnés. Je voulais sans doute tatouer ma vision du monde ; le système de tatouage correspondait à un type d'écriture qui imprégnait fortement ma vision. mais…

La suite je la connais tu as fini par abandonner cette manière de voir, même par y renoncer, pourtant il y avait sans doute quelque chose à exploiter dans cette façon de faire!.

- JS : En fait dans ce cas ,je m'étais contenté de reproduire un système d'écriture que j'avais déjà utilisé quelques années auparavant en travaillant sur d'autres séries anciennes. Au bout d'un certain temps j'ai ressentit un malaise. J'avais l'impression de m’enfoncer, de faire fausse route. Cette trame sculptée que je plaçais entre ma vision de la réalité et moi, me semblais quelque part inutile voir même artificielle. J'avais besoin de créer une sorte de barrière entre moi et la réalité , cette trame ( ce tatouage artificiel ) que je plaçais entre moi et le monde m'empêchait quelque part d'aller à l'essentiel. L'essentiel sommes toute c'était pour moi de créer une sorte de renouvellement de ma vision, mais pas seulement de ma vison intime du monde, mais aussi de celle que je portais sur la peinture.

Il y a eu une période de flottement?

Il y a eu une période de déception et de flottement, je me suis arrêté de travailler dans cette direction car j'avais l'impression de m'enliser et cela m'a occasionner un malaise, car je n'aime pas renoncer à une vision. J'avais travailler peut être pendant trois mois sur cette série, je m'apercevais soudain qu'elle menait à un cul de sac, c'était désespérant car après une première phase d'exaltation, je me retrouvais comme jeté dans un précipice dont je ne voyais pas le fond.

Matisse et Picasso sont surgit à ce moment là sur ta route, pourquoi justement MATISSE ET PICASSO?

C'est une chose mystérieuse, mais elle doit posséder elle aussi un sens logique. La direction que prenais mon dessin lorsque je travaillais sur mes premières visons exotiques était ce qui me gênait le plus, il me semblais que j'ajoutais de la complexité à une chose qui devait rester simple au départ. L'enchevêtrement des lignes que je posais sur la structure de mes dessins me semblait absurde j'avais l'impression d'être emprisonné dans une structure de signe qui était inutile. J'avais besoin de me confronter à d'autres systèmes d'écritures en particulier à des systèmes simples. Comme mes visions tournaient autour d'un nu, j'ai compris à ce moment que je devais aller me confronter au travail accomplit par ceux qui avaient déjà abordé le nu sous sa forme la plus élémentaire et la plus épurée. J'ai commencé par redécouvrir Matisse, car par rapport à Picasso c'était avec lui que je me découvrais le plus d'affinités. Matisse pratiquait déjà à sa façon une forme de métissage. Il coupait ,et mélangeait, avec une folle dextérité couleurs formes lumières et espaces, de même il juxtaposait couleurs tons formes et rythmes dans une sorte de grande kermesse joyeuse qui faisait éclater la peinture en aplat dans toutes les directions. J'avais besoin d'apprendre l'aisance de Matisse. Même si certains de ces nus étaient biscornus, cela n'avait pas d'importance, ce qui m'importait de mettre à jour chez Matisse c'était la structure rythmique et musicale de sa peinture, et d'observer par la même occasion la trame décorative sous- jacent, je voulais observer son emploi du motif décoratif et sa façon de défigurer la réalité. J'avais besoin de m'approprier sa vision féminisée du monde. J'ai donc copié du Matisse, pendant un certain temps, des nus surtout pour m'imprégner de leurs structures. Simultanément, je travaillais sur l'étude des symboles aborigènes, car la forme poétique mystérieuse de leurs motif m'impressionnait, en fait d'un point de vue technique la grâce l'aisance la fraîcheur des artistes aborigènes m'impressionnait autant que celle de Matisse c'était la même structure qui s'accomplissait sous des formes différentes.

Les croisement dates de là ..

C'est à partir de là que j'ai commencé par comprendre que le véritable métissage devait se réaliser comme un exercice de contrepoints, il devait se faire à partir d'un travail de juxtaposition des divers éléments qui m'inspiraient. C'était dans leur confrontation que le jeu du métissage des formes pouvait avoir lieu. Art - moderne - Art aborigène pris en contrepoint ces deux structures se complétaient, leur contraste permettait d'affirmer l'idée d'un art polymorphique. C'est de la juxtaposition des éléments pris à Matisse et aux aborigènes qu'est née la métisse. La forme de la métisse est d'ailleurs un clin d'œil fait sciemment à Matisse, la forme cadrée est un clin d'œil fait aux art décoratifs, mais particulièrement aussi aux structures emblématiques des primitifs qui comporte souvent un cadre qui dessine le motif et le fait voir comme une chose étrangère qui se distingue de la réalité.

L'influence de Picasso…

L'influence de Picasso est moins visible que celle de matisse, car elle a surtout joué dans les études de nus que j'ai réalisé. Picasso est un très grand dessinateur, les contrastes étonnant qu'il admet dans ses dessins sont pour moi qui est un de ses admirateurs un sujet d'émerveillement. J'ai repris le goût du dessin en observant les siens mais aussi en les copiants.








Les systèmes d'écriture.



Ce qu'il appelle les systèmes d’écriture, ce sont ces apparitions de style disparates qui jalonnent son parcours et qu'il a découpées au fur et à mesure de leurs apparitions en autant de tranches qu'il y avait d'apparitions. Pendant très longtemps, il a du se battre contre l'idée toute faite d'un style unique. Cette idée qui est le fait d'un préjugé posé par les esthéticiens sur la manière de faire des peintres, correspond à l'idée qu'un individu humain ne possède qu'une seule manière digne de le représenter et qu'on appelle le style. Son style à lui c'est d'en avoir plusieurs, clame t'il, sa manière à lui c'est de montrer la multiplicité des figures intérieures de l'être humain et aussi celle de la vie. La possibilité de sauter d'un style à l'autre ou d'une manière de faire à l'autre fait partie de la nouvelle façon de voir de l'homme actuel, de l'homme post- moderne comme certains l'appellent. Les systèmes d'écriture qu'il met à jour correspondent à différents strates de la sensibilité qui est en lui , à autant de facettes de son être. " Je suis un être unique composé de multiples points vues parfois contradictoires" dit il. Selon lui l'aspect polysémique de sa peinture est ce qui en fonde la part la plus radicalement moderne. -" Cette manière de voir à du mal encore de s'imposer aujourd'hui; pourtant demain (dans le futur) on la considérera comme normale. Nous sommes des hommes pluridimensionnels, c'est ainsi nous sommes fait de multitudes de choses. Nous sommes rentré dans l'ère de la polymorphité. Nous sommes des êtres uniques et multiples.-"(Entretiens 2003).


UNE QUESTION.

Cette manière d'affirmer la polymorphité et de la revendiquer comme faisant partie de ta démarches, est ce que tu peux la dater? D'autre part peut tu préciser le sens que tu donnes à ce que tu appelles les systèmes d'écritures.

-JS : La dater c'est difficile, j'ai pris conscience de la nécessité de poser cette manière de faire, d'une façon très progressive. Au début lorsque je voyais apparaître des styles contradictoire chez moi j'avais tendance à les refouler à les nier même, car j'avais été élevé dans l'idée que le peintre doit engendrer une œuvre qui possède un style unique. Pourtant très tôt j'ai pris conscience que le système des beaux arts ou de l'art en lui même reposait sur des systèmes d'écritures - Picasso ma aidé à prendre conscience de ça, car il sautait avec une grande liberté d'un genre à l'autre - . Par exemple lorsqu'il m'arrivait de croiser des visions de peintres qui étaient passés avant moi, je n'avais aucune difficulté pour me les approprier, car je considérais normal de marcher dans les pas d'un peintre qui m'avait précédé, et donc de copier son système de vision, celui qui fonde son écriture pour mieux me l'assimiler. Comme il existe une multitude de peintres il existe forcément une prolifération de systèmes identitaires d'écriture .Car les visions sont aussi des systèmes identitaires dans le monde très individualisé qui est le nôtre. Vous avez un Miro, un Klee, un Mondrian, un léger,etc. tous possèdent leur propre système d'écriture. J'ai passé d'un système d'écriture à l'autre, lorsque j'ai étudié ces peintres, et j'ai subi les influences de ces systèmes d'écriture à mon époque. Je me suis aperçu que plusieurs systèmes d'écritures pouvaient très bien cohabiter, puisque je pouvais étudier en simultané Klee Miro et Pollock sans y trouver à redire. C'est sans doute pourquoi, lorsque j'ai vu apparaître en moi des visions liées à des systèmes identitaires différents, j’ai trouvé normal qu’ils cohabitent .Je possède à présent entre huit et dix systèmes d'écritures qui peuvent se développer d'une façon autonome et cohérente, ils représentent chacun des formes d’explorations différentes de la réalité mais aussi des formes variées de mes identités. Je me considère un peu comme un musicien qui utiliserait un instrument capable de produire plusieurs sortes de partitions musicales distinctes. Sur mon clavier je peu jouer des notes qui appartiennent à des registres totalement différents les uns des autres, je peu aussi combiner ces différentes sortes d'écritures, si j'en ai envie. Mais dans un premier temps je les laissent s'exprimer, en les laissant s'exprimer, je sais qu'elles vont me révéler des choses extrêmement personnelles et qu'elles me conduiront peut être dans des endroits encore jamais explorés. La prolifération de ces écritures ne me fait pas peur, elle appartient désormais à ma manière habituelle de faire.










LE PRIMITIVISME


Il est impossible de considérer son travail sans faire référence au primitivisme, car toute sa démarche antérieure et même celle qui se poursuit aujourd'hui sont entachées de primitivisme.



NG: Te considères tu comme un peintre qui travail dans la grande lignée des primitifs, ou bien considères tu le primitivisme comme un simple argument qui militerait en faveur de ta peinture?

JS: C'est une question un peu tranchée. Très tôt je me suis senti des points d'affinités avec les peintres qu'on appelle primitifs, pourtant je ne savais pas au départ que je faisais partie de leur famille ; ce n'est qu'après une longue errance que j'ai découvert mon attachement à cette famille.
NG: Pour toi le primitivisme ça recoupe quelle parties du monde?
JS:Il y a des notions d'espace de temps et de perception qui sont imputables au primitivisme et qui lui appartiennent. Ces notions transcendent l'espace temps et les données historiques. Il y a aussi une donne esthétique, qui appartient au primitivisme et qui lui est propre et qui est très riche mais c’est donne est pour moi plutôt secondaire.
NG: Pour toi le primitivisme, plutôt qu’un mouvement ou une école ce serait plutôt plus un état lié à une façon d’être.
JS:
Il faut distinguer le primitivisme comme mode, comme phénomène culturel et artistique, dans nos sociétés de ce qu’il recouvrait au départ comme notion pour ceux qui s’en sont revendiqués ; on trouverait probablement des affinités entre les courants primitivistes qui existaient au moyen -âge et ceux existant dans l’ère moderne, on trouverait aussi probablement des choses antithétiques entre eux.
Dans mon esprit, le peintre primitiviste au sens moderne archétypale – est lié à une notion au premier degré bien naïve - c’est un être bercé par l'espoir de la vie, il croit aux formes sensuelles aux élancements des corps aux grands bercements de l'âme. Il pourrait d'abords faire appel à son instinct, car il n’est pas encore coupé de la nature et surtout de sa propre nature. Je pourrais concevoir qu'un peintre primitiviste fasse simplement appel à son goût inné de l'harmonie et des formes mais je ne crois pas qu'il doive abandonner pour autant sa responsabilité vis à vis de son intellect et vis à vis de la culture dont il est issu, car le primitiviste peut régler ses comportements sur ceux d’une culture raffinée.


NG: Quelle différence fais tu entre primitif, et primitivisme ?
JS:
Le primitif authentique est un être religieux qui fait hautement confiance en son instinct, et aux forces sacrées, il accorde une importance plus grande aux phénomènes surnaturels que l'homme actuel celui du cyber - espace, il est prêt à admettre que le monde est gouverné par des forces magiques. L'homme moderne sait lui que le monde du cyber- espace est un monde inventé par les hommes, il a perdu une partie de son innocence, il sait calculer et établir des rapports de proportions et de surfaces, en utilisant des chiffres des nombres et des notions de grandeurs héritées des systèmes métriques et algébriques. Le primitif n'a pas besoin de ces instruments, car il a son instinct et une tradition millénaire pour le soutenir. L'homme moderne a perdu son innocence et il n’est plus soutenu par une tradition accordée à la nature , c'est-à-dire par une tradition en phase directe avec l’esprit des choses sacrées L'homme moderne est seulement capable d'imaginer ce que pourrait être la vie à l'état naturel , il tente de recrée les conditions qui donnèrent naissance à l'état de grâce du primitif, c'est cette poésie du retour à l'état de grâce édénique du primitif qui est pour moi le fondement principal du primitivisme.

NG: Le primitivisme selon toi serait une sorte d'esprit utopique née du désir d'innocence à jamais impossible à retrouver.

En partie oui. Je sais que ce n'est pas très facile de toujours pouvoir faire les distinctions adéquates. Certains d'ailleurs me contesterons cette façon de voir probablement avec raison.. Il faut sans doute distinguer dans ce qu'on appelle le primitivisme, plusieurs version du même concept, si on peu appeler ça comme ça. Il y a le primitivisme au sens ou l'entendaient les historiens d'art il y a peu de temps encore et qui occupe toujours le devant de la scène, car nous sommes tous issus, nous les occidentaux de la même cuisse. Ce primitivisme là est née de l'intérêt marqué pour les artistes modernes pour l'art et les cultures des sociétés tribales. Cet intérêt s'est surtout manifesté à la fin du XIX siècle en relation d'ailleurs avec le fait colonial, car c'est le fait colonial qui a incité les artistes à s'intéresser à des cultures exogènes. Cela a pris des proportions de plus en plus importantes à une certaine période; ce sont surtout les œuvres océaniennes et africaines qui ont captivé les artistes. Gauguin naturellement a été une des grande figure de proue du primitivisme; non seulement parce qu'il a trouvé dans la culture maori des éléments plastiques qui permettaient de renforcer son désir de naturel; mais aussi parce que les cultures primitives qu'il a côtoyé lui permettaient de réévaluer tangiblement les préceptes artistiques issus de la culture occidentale. La totale liberté de la couleur le rôle joué par les symboles décoratifs et sculpturaux , l'abandon de la perspective, tout cela à contribué à la remise en cause des canons esthétiques classiques; tout cela tout ce qui a contribué à la naissance de l'art moderne comme on l'appelle, n'aurait peur être pas été possible sans l'apport du courant primitiviste qui a servit d'accélérateur ; les cultures primitives comme ont les appellent continuent toujours de servir de vivier pour les continuateurs des artistes modernes je considère que j'en fait un tout petit peu partie, même si l’essentiel de ma démarche ne se trouve pas là .
Au début du siècle on a vu les fauves, les symbolistes pour partie, les expressionnistes allemands s'engouffrer dans la brèche du primitiviste et puis des figures emblématiques de l'art sont apparues qui faisaient référence aux arts primitifs, Matisse, Picasso, Brancussi, Modigliani, plus près de nous on cite Keit Haring Penck et Beuys, parce que nous aimons les simplifications, mais sans doute le courant primitivisme et beaucoup plus étendu et demain sans doute on s'apercevra qu'il recoupait des domaines assez inattendus. Aujourd'hui, pour certains le primitivisme est devenu une forme de revendication militante et politique. Au états Unis les partisans de la Deep écologie ( l'écologie profonde) militent pour une perspective de retour au pleistocène ( l'ère géologique au cours de laquelle sont apparues les espèces humaines).IL y a une séries de courants anarcho primitivistes qui critique l'ère de la technologie et qui rêve d'un retour à l'ère de la cueillette et de la chasse, cela peut paraître risible, mais cela fait partie du caractère de notre époque qui aspire à retrouver plus de sérénité et plus de naturel. L'idéal primitif existe sous la forme d'un mythe ; c'est le mythe d'une société solidaire, d'une société livrée aux plaisirs de la culture de la pêche et de la chasse , une société ou le rêve et parfois les plaisirs des sens tiennent une place primordiale , c'est surtout la nostalgie d'une vie qui se déroulerait totalement en harmonie avec le cosmos. Car ce qu'il y a de plus édifiant dans les société primitive, c'est leur capacité à se considérer comme des sociétés cosmique. Elles possèdent par rapport à nous un degré de compréhension supérieur des mécanismes d'interaction et de solidarité qui agitent l'homme au sein du cosmos; souvent leur sagesse naturelle est bien supérieure à la notre. Naturellement, il existe une grande diversité de sociétés primitives, car elles n'étaient pas toutes semblables. En fait nous avons toujours besoin de nous confronter à la fraîcheur et à cette forme d'innocence qui forme le plus souvent le soubassement de ces sociétés ; c'est pourquoi elles nous sont encore si indispensables; elle nous renvoi une image de l'humanité qui nous permet de rêver sur nos origines mais aussi sur notre innocence disparue.


N.G:

Je constate que tu introduis une rupture avec la manière de penser qui était la tienne il y a quelques années. A une certaine période tu semblais à l'œuvre, de plein pieds puis je dire dans l'univers « du primitif » du primitif, au sens ou tu l'entends, c'est à dire comme un être qui ne fait confiance qu'à son instinct et aux forces sacrés. A une période tu te considérais presque comme un vrai primitif; comme un primitif moderne au sens plein. Aujourd'hui j'ai la sensation que tout cela pour toi est du passé, tu sembles parlé du monde sacré du primitif au passé.

JS:

C'est un fait à une période dans mon travail pictural et dans mes performances "d'artiste vivant" j'avais sans doute pu vouloir rejoindre le cœur, le pur cœur de l'univers primitif. J'ai marché sans compromission sur les traces des hommes qui habitaient la grande terre sacrée Depuis je me peu dire que je me suis éloigné de cette terre. J'ai arrêté tous mes rituels de célébrations. Le primitif que j'étais est devenu , un homme moderne a part entière il a consentit à laissé derrière lui, le grand espace sacré du passé, il œuvre à présent dans le présent plus comme un primitiviste, c'est à dire comme un amoureux des formes primitives et moins comme un primitif, c'est à dire comme quelqu'un qui agît et se comporte comme une - pierre du cosmos - ; car la roue a tournée, la roue irréversible du temps à tournée , de la pierre brut polie par le temps que j'étais, je suis devenu marbre, un marbre poli par les mains de l'homme ,j 'ai rejoins quelque part le monde de la civilisation et de la culture dont je suis issu. J’ai toujours su que ce retour était inévitable, car nul ne peu vivre en dehors du présent.

















La veine pariétale.



C'est une manière de peindre qui a marqué pendant très longtemps son espace pictural. En fait pour lui la veine pariétale appartient plutôt à une manière de voir plutôt qu'à une manière de peindre, mais n'en est il pas ainsi de toute la peinture?

NG: L'écriture pariétale, enfin ce que tu appelles toi l'écriture pariétale, aura joué un rôle très important dans ton activité, comment expliques tu ça?

JS: A vrai dire je ne me l'expliques pas; je peu tout au plus tenter de trouver à cela une explication aujourd'hui. En fait, je crois que pour tenter de retrouver le geste premier, le geste des origines, (c'était ce qui m'intéressais à une certaine époque), je suis allé me confronter à la manière de faire des hommes issus de ce qu'on appelle l'âge des cavernes. C'était aussi, parce que je me sentais beaucoup d'affinité avec cette manière de peindre surtout des animaux que je suis resté pendant très longtemps debout en admiration au milieu du paysage pariétal. J'ai souvent copié les traits et les figures élémentaires de ces grands ancêtres. En opérant de cette manière, je voulais aussi me distancer je crois d'une façon radicale de tout l'acquis historique lié à la manière de peindre européenne ou simplement de celle liée à l’héritage historique classique occidental. Les peintres de l'ère pariétale sont les premiers vrais grand peintre de l'ère civilisé, après eux, l'homme n'a jamais fait mieux, il n'a jamais fait que se répéter. Toute la grandeur, toute la splendeur de l'espace de représentation émotionnel dont l'homme est capable, se lit à travers ces peintures, on n'a jamais fait mieux après que sous des formes différentes.

NG: Ta mesure de l'art s'est située très tôt en quelque sorte en dehors de la mesure qui ordonne l'art moderne occidental; je veux dire celle que tu as adoptée presque instinctivement lorsque tu as décidé de peindre. La mesure de l'art adoptée par les artistes pariétaux, n’est pas la mesure adoptée par les artistes de l'ère moderne.

JS. C'est difficile pour moi de dire que je me suis situé d'emblée en dehors de la mesure de l'art occidental, car j'avais toujours sous les yeux les exemples d'artistes de l'art moderne occidental qui me servaient de référence même au moment ou je parcourais le monde primitif originel; mais il est vrai qu'à un certain moment pour m'écarter de cette mesure, j'ai voulu plonger dans une autre ; j’ai voulu me confronter à une mesure – Hors temps- , et la mesure – hors temps – est celle du cosmos .
Matériellement la mesure de l'art pariétal n'est pas celle de l'art moderne car la vision de l’artiste originel n’est pas celle de l’artiste moderne; de même la mesure de l'antique art chinois qui a été un de mes autres point de référence ; cette mesure n'est pas celle de l'art moderne occidental. Le grand espace de l'art chinois est un espace autrement plus vaste que celui de l'art moderne occidental, il implique une dimension métaphysique que l'art occidental peine à mettre à jour, mais l’art moderne pourtant à ce grand avantage c’est qu’il permet de donner libre cours à toutes les explorations . On peu dire que le grand art pariétal possède une dimension émotionnelle plus proche de l'art des cathédrales que de celui de l'art moderne, totalement désacralisé, mais rien n’est certain, certaines toiles de Pollock ou de Rotka pour ne citer que deux artistes connus se rapprochent de l’art pariétal par leur fond .
NG: Mais les modernes sont allé très loin au niveau de l'investigation de l'espace pictural , en le désacralisant ils lui ont permit de s'affirmer d'une façon plus autonome et ils ont permis à l'artiste de s'exprimer librement dans une multitudes de directions nouvelles même si elles apparaissent parfois sans issues.

JS:
L'espace pictural de la modernité est extrêmement mobile et il permet toutes sortes d'explorations, je ne considères pas que cet espace soit en contradiction avec l'espace d'exploration primitif, il peut très bien se l'assimiler pour créer de nouvelles pistes d'explorations; mais cet espace protéiforme me semble parfois restreint d'un point de vue spirituel il semble n'offrir d'autres perspectives que celles de la manipulation; sont objectif n'est pas de d'apporter à l'homme une nouvelle rentrée dans lui même, son objectif c'est plutôt de conquérir toujours plus d’espace au niveau de l’apparence.

NG. Les mondes primitifs anciens selon toi, avaient davantage pour objectif de rendre l'homme plus proche du ciel.

JS: -Les pensées des hommes doivent s’élever vers les hauteurs, comme font les aigles –C’est une pensée tirée d’un précepte Indien .C’est la sagesse des hommes anciens qui parle. L'homme des époques anciennes était plus entier, moins fragmenté, moins coupé de ses racines naturelles, il était plus apte à saisir la part immanente et sacré qui s'attache à la vie, car il vivait dans des environnements moins pollués, son éducation l’orientait vers le renoncement aux apparences.
Rien n’empêche l’homme moderne de se référer à ces valeurs universelles. Comme notre époque à complètement changées et que tous les équilibres naturels semblent compromis, il est peut être plus difficile de renouer avec ces modes de pensée universels, notre monde semble uniquement préoccupé par des avantages matériels, notre bien être et notre confort matériel passe le plus souvent avant tout le reste , la recherche du dépouillement ou le travail de purification en vue d’une renaissance, ne fait plus partie de nos traditions ; il faut aller chercher seul, ce que la société est incapable de nous offrir. Cela nous oblige à capturer des énergies nouvelles en provenance du présent, nous devons nous frayer de nouvelles voies , capter de nouvelles clés de réalisation, cela implique une nouvelle disponibilité, une nouvelle manière d’être et de penser sans renoncer à ce que nous sommes, des êtres fragiles vulnérables et entêtés.

NG:
Pour en revenir à des vues plus concrètes, peu tu me dire ce qu'il reste de ton travail pariétal aujourd'hui.

JS: Il en reste peu de chose, sauf des bribes. J'ai modernisé certaines formes d'écritures issues du mode d'exploration pariétal.
J'ai aussi conservé certaines formes d'écritures qui possèdent toujours le caractère initial de la veine pariétal, car j'ai besoin régulièrement de me replonger dedans; c'est comme si j'avais besoin régulièrement de venir me confronter à cette veine et à son caractère authentiquement originel .
Lorsque je retombe dans le monde de la peinture je redeviens plus pragmatique, heureusement car j’ai toujours trop tendance à trop à m’envoler La peinture m’oblige à me fixer.











































LE SQUATTING



Le squatting est issu directement de la période "underground"de JS. Les travaux qu'il réalise aujourd'hui de cette veine, sont le prolongement directe de ses années passées dans les squats, simplement ils n'ont presque plus rien à voir avec ses années glorieuses ou la récup au sens premier jouait un rôle clés dans sa production. La récup à changé de sens, elle est moins axée sur les matériaux brut, sur l'échange ou le vol des œuvres entre peintres issus de la même bande elle consiste en vol de d'œuvres ou de fragments d'œuvres appartenant à l'histoire de l'art. Celui qui a joué le plus avec cette façon de faire c'est Picasso. Picasso a copié et récupéré Vélasques , Monet,Ingres etc.. JS continue à sa manière dans la tradition moderne de la récup .Son peintre fétiche celui qu'il copie détourne et récup le plus régulièrement c'est Jean Dubuffet. C'est sans doute parce Jean Dubuffet lui a acheté ses tous premiers travaux ceux des années 79-80 qu'il s'acharne à lui rendre hommage sous une forme détournée, parfois ironique. Il détourne surtout un fragment de l'écriture de Dubuffet l'hourloupe. Il a réalisé aussi des détournements d'œuvre de Picasso Mondrian, klee, et de Ben.


Finalement le squatting que tu pratiques s'apparente beaucoup à une forme de – reprise- reprise au sens ou l'entendais Picasso qui réinterprétais souvent des partitions ancienne, comme le déjeuner sur l'herbe, d'ailleurs Monet lui même c'était inspiré pour construire ce tableau d'une tableau très ancien je crois…

-JS :Le squatting va plus loin au départ que la simple réinterprétation; le squatter est carrément voleur. Le squatter s'empare d'un élément d'une œuvre appartenant à quelqu'un pour en faire autre chose ou pour l'utiliser comme un faire valoir. Il y a un phénomène d'appropriation dans le squatting qui n'est pas tout à fait étranger à l'esprit de l'art moderne. L'art moderne ( enfin les artistes de l'art modernes) ont récupérés beaucoup d'idées de techniques beaucoup d'œuvres appartenant à des époques différentes . Les squatters modernes font la même chose avec les œuvres contemporaines. En réalité le procédé n'est pas très courant chez les squatters , je suis même presque le seul actuellement comme ex squatter à faire du squatting d'une façon régulière et à le revendiquer , d'ailleurs le squatting a perdu à mes yeux beaucoup de son insolence de départ comme c’était le cas au début d’art - cloche , le fait de s’emprunter ou de se voler des œuvres pour en construire de nouvelles me paraissait plus drôle plus excitant qu’à présent . Je pratique le squatting aujourd’hui, un peu comme un esthéticien, surtout d'un point de vue technique, l'idée de faire scandale ou l’idée de transgresser des pratiques artistique (idée qui m'occupait au départ) ma presque abandonnée.

Dans ta série squatting tu reprends un unique et même fragment d'œuvre appartenant à Dubuffet…

J'ai commencé par squatter l'écriture de Dubuffet pour m'amuser, mais aussi parce que je crois que d'un point de vue technique c'est la meilleur façon de faire. Pour que l'œuvre de squatting soit facilement identifiable et repérable il faut limiter le nombre des écritures qu'on récupère. En reprenant l'écriture de Dubuffet sur certaines de mes toiles et en systématisant le procédé, j'en fais une technique à part entière. L'écriture de Dubuffet en tout cas celle de la série que j'utilise qui appartient au cycle de l'hourloupe est tellement connue et si aisément identifiable qu'on la reconnaît instantanément. Il n'y a que les esprits naifs pour me dire , - Oh mais vous peignez comme Dubuffet! Ou bien - il me semble que j'ai déjà vu cette peinture ailleurs!- Je procède dans mes squattings de façon à ce que l'on voit que c'est un détournement volontaire. Pour que le squatting tel que je l'entends soit du squatting, il faut qu'on aperçoive en premier l'écriture de celui qu'on a détourné. C'est elle qui attire l'attention, c'est ça pour moi l'esprit du squatting. C'est l'image volée qui attire l'attention.
Je peu naturellement procédé à des accumulations de détournement, mais pour que cela fonctionne réellement comme du squatting il faut que ça fonctionne au niveau de l'effet immédiat, même avec plusieurs images ou plusieurs écritures. D'ailleurs il n'est pas bon de s'arrêter à un procédé, il faut essayer de rendre les choses le plus subtilement possible ; à ce niveau j'ai encore du pain sur la planche.


J'ai comme l'impression d'ailleurs que tu commences par t'éloigner dans certains tableaux récent de la série squatting, de cette définition que tu donnes du squatting. Je pense à cette toile récente que j'ai aperçu dans ton atelier elle s'appelle je crois "les deux sœurs". Ce qui attires le regard dans cette toile, ce n'est plus la partie détournée ou récupérée, mais c'est l'ensemble du tableau; l'élément détourné ou volé n'a plus le sens violent de départ, il est absorbé par la nouvelle forme que lui donnes, il se banalise en quelque sorte.


Avec cette série j'inclus des éléments réalistes dans la toile , j'expérimente de nouvelles possibilités. Mais cette série est trop proche de moi pour que je puisse en parler objectivement, si tu veux bien on en reparlera dans quelques temps; j'aurais acquis un recul plus grand sur ce travail qui débute à peine.

Tu n'aimes pas parler de tes travaux les plus récents…

Je crois que c'est le cas de la plupart des gens qui font quelque chose de leurs mains, il préfèrent je crois attendre que ce qu'ils font soit fini pour en parler.. C'est un simple réflexe de protection, tant qu'une chose n'est pas fini, on a l'impression qu'elle peut toujours s'effondrer. Dans le cas le la peinture il y a aussi cette chose qui joue comme pour tout le reste de la création d'ailleurs; la distance intellectuelle et mentale vis à vis de ce qui est produit ne peut réellement exister et prendre forme qu'avec le temps. C'est seulement après quelques années de distance que je découvre les qualités et les défauts de mes travaux, sur le coup j'ai beaucoup de mal de les voir. Face à ce que j'ai fais de plus immédiat, je suis comme un idiot ou comme un abruti je pourrais en dire n'importe quo , même en me persuadant d'avoir raison je suis sur que je pourrais me tromper à leur sujet , et cela dans quatre vingt dix pour cent des cas . Tout ce que je peu avoir c'est l'intuition d 'une chose, bonne ou mauvaise. C'est en poursuivant cette intuition quej 'avance à la découverte du monde. Je suis moi même étonné des impasses et des nouvelles perspectives provoquées par mon travail. Il y a une logique de la création qui me dépasse et qui me transcende, je crois que cela se passe toujours comme ça pour toutes les vraies entreprises de création.






































LES SQUATS D'ARTISTES



Il a appartenu à la première génération des artistes squatters, il occupe même pour certains une place mythique à l'intérieur de cette galaxie car il en un des fondateurs.

NG: Le mot fondateur ne te fait pas peur, il est très chargé symboliquement, qu'en penses tu?

JS:
Le mouvement des squats d'artistes est un mouvement hétérogène remplit de contradictions de toutes sortes. Le fait de dire qu'il y a des fondateurs à ce mouvement c'est lui donner une histoire et lui forger une identité qu'il tend toujours de par sa nature violemment contestataire et anarchiste à vouloir nier; pourtant ce mouvement n'est pas née contrairement à ce que certains pense d'une opération du Saint Esprit, il possède une histoire , je fais partie de ceux qui ont contribué avec Art - Cloche à forgé cette histoire. On peut ne pas apprécier AC et certains peuvent avoir aujourd'hui du mal à se reconnaître à travers cette galaxie de créateurs contestataire; pourtant Art - Cloche occupe historiquement dans le mouvement la place qui est la sienne celui du mouvement fondateur.

NG:
Art - Cloche était un groupe assez hétérogène, y avait t'il quelque chose qui le distinguait des groupes d'artistes squatters d'aujourd'hui?

JS:
Je n'ai pas la prétention de connaître sur le bout des doigts le mouvement présent je peu toutefois constater des différences entre hier et aujourd'hui. Le mouvement d'aujourd'hui, je l'ai de nouveau côtoyé presque dans son intégralité l'an passé à l'occasion de l'exposition au Palais de Tokyo. J'ai pu constater sa vitalité, et ses points d'ancrages parfois violemment divergeants; mais ce n'est pas ce qui est nouveau. Ce qui semble nouveau dans ce mouvement, c'est cette extrême détermination à perdurer. Non pas que hier nous n'avions pas l'idée de perdurer en tête; nous étions aussi déterminés à durer qu'aujourd'hui, mais nous vivions beaucoup plus dans un sentiment d'instabilité. Le mouvement des squats d'artistes à l'époque d'art Cloche n'avait pas l'antériorité historique qu'il possède aujourd'hui. A l'époque d'A C le mouvement ressemblait beaucoup plus à une famille qu'à présent, tous les gens de la famille se connaissaient, et les différentes familles, même si elles pouvaient parfois se chamailler se reconnaissaient immédiatement des points communs; ceci était particulièrement évident dans la phase immédiate qui suivit la disparition d'A C . A cette époque je me promenais dans les différents lieue d'occupation artistique dans Paris avec le sentiment d'être chez moi partout; c'est à dire que j'étais accueillis en ami et j'avais réciproquement une profonde amitié pour la plupart des personnes que je côtoyaient , nous appartenions tous à la même famille. Cette famille ce n'était pas uniquement celle d'Art Cloche,c'était celle de Potain, de Dubail de Pelleport de Loz etc.. et plus tard celle des récollets; il y avait des fêtes communes et des points d'affinités commun. Aujourd'hui j'ai le sentiment que ce mouvement est moins soudé affectivement qu'il ne l'était hier, il est plus éclaté , les gens sont plus étrangers les uns aux autres.

NG:
Une des particularité d'Art - Cloche c'était de créer de grand festivals artistiques , ceux ci rassemblaient les artistes du groupe sur un même plan d'égalité ,cela créait une sorte de synergie . Art - Cloche invitait tous les artistes à s'affronter en délirant positivement un travail de catalyse artistique et émotionnel soudait le groupe et le faisait participer à une démarche artistique communautaire, c'est peut être ce qui manque à la génération actuelle qui peu paraître trop engoncée dans ses particularités .

JS:
Il est toujours facile de parler du passé en termes flatteur, tirer des comparaisons n'est pas simple, pour chaque époque il y a des occasions et des opportunités à saisir en terme de création, il suffit de s’en donner les moyens. Nous étions peut être plus utopiste que certains aujourd'hui, car nous étions pour la totale gratuité, pour une créations totalement libre, guidés pour certains par l'idée que la magie poétique pouvait résoudre toutes les questions, nous étions totalement disponible pour tout.

NG: Qu'elle est ta position au sein du mouvement aujourd'hui?

JS: Après être remonté au créneau pour défendre la place historique occupée par AC, j'ai repris de nouveau de la distance par rapport au mouvement. J'ai tendance aujourd'hui à m'en écarter de plus en plus, du fait que je ne suis plus actif sur le terrain. En fait ma vie à prit d'autres directions, mais je reste fidèle à ma famille d'origine, je reviendrai pour la défendre si cela s'avérait nécessaire. .














PORTRAITS FACE ET PROFIL


Il ma dit un jour que ces portraits n'étaient pas dans son esprit vraiment des portraits seulement des effigies, des sortes de représentation symbolique d'un homme abstrait qui n'était pas censé spécialement le représenter lui . C'est seulement après que beaucoup de personnes en voyant ces portraits lui ai fait remarquer qu'il y avait une trop grande ressemblance entre eux et lui qu'il a fini par admettre que tous ces portraits pourraient au final appartenir à une sorte de vaste tentative d'auto- représentation qui lui avait échappée .

Pourquoi considères tu avec une telle réticence l'idée que ces portraits puissent te représenter toi et pas seulement un être abstrait ou symbolique comme tu en as en défendu l'idée pendant très longtemps?

-JS :Il n'est jamais agréable de découvrir que l'on est un être narcissique à l'extrême; admettre l'idée selon laquelle ces portraits de face et de profil me représentent, c'est admettre que l'auto célébration à joué un rôle prépondérant dans mon activité picturale. Un marchand ma dit un jour en regardant ces portraits que j'étais extrêmement narcissique comme la plupart des artistes ; pour lui tous ces portraits de face et de profil étaient des autoportraits, cela voulait dire dans son esprit que je passais une grande partie de mon temps à me glorifier comme le font souvent la plupart des artistes. Cette définition abrupte de la création et de mon propre activité ma choquée car je ne l'avais pas assez considérée sous cet angle ; puis j'ai fini par admettre quelle pouvait aussi exister sous cet angle ; trop de personnes me posaient des questions au sujet de ces portraits beaucoup en effet n'y voyaient rien d'autre qu'une vaste tentative narcissique.
Si les personnes qui contemplent ces portraits y découvrent une ressemblance entre eux et moi; c'est probablement qu'il doit y en avoir une. J'ai fini par admettre que ces portraits puissent aussi me représenter.
Pourtant au départ j'ai utilisé cet emblème, comme un pur emblème abstrait, c'est à dire que je n'y ai pas associé l'idée d'un autoportrait. Je représentais un visage d'homme c'est tout, c'était uniquement ce qui m'intéressais, je ne voulais pas que les gens disent en voyant ce portrait tient ça c'est toi. L'homme emblématique à prit mes traits, du moins en partie, c'est comme ça , je n'y peu rien; la chose c'est fait inconsciemment et forcément à mon insu, car je me suis toujours éviter de penser à moi, lorsque je dessinais cette forme symbolique; elle a donc prit mes traits sans que je m'en aperçoive, comme si c'était une chose presque inévitable.






































Les Estampes informatiques.



Ce qu'il appelle des estampes informatiques, ce sont divers travaux qu'il a réalisés sur ordinateur. Ces travaux (il en a réalisé entre quatre cent et cinq cent) souffrent d'être considérés comme des travaux de seconde main par les amateurs ou les collectionneurs qui ne trouvent pas leur compte dans ces images, car elles sont replicables à l'infini. Lui considère que ces travaux sont aussi important que les autres, il leur trouve même un intérêt particulier du fait qu'ils sont liés au développement des nouvelles technologies de l' informatique.

Tu trouves que ces travaux ont la même importance que les autres, pourtant ils sont contestés par certain du point de vue créatif car ils sont reproductibles à l'infini ; d'autre part le format utilisé pour le mode de reproduction, les rend peu convaincant ; car c'est uniquement sur ton imprimante à jet d'encre que tu les imprimes.

-JS :Ce qui rend surtout ces travaux douteux pour les amateurs ou les collectionneurs, c'est leur capacité à être reproduit à l'infini. les amateurs et collectionneurs d'arts sont des fétichistes du produit unique et de l'image originelle, ils se sentent lésés si on leur propose des images qui sont susceptibles d'être démultipliées. C'est un réflexe normal pour quelqu'un qui achète un travail artistique de vouloir qu'il soit unique.
Mon point de vue est différent sur la question car je suis un artiste, j'aime jouer avec toutes les possibilités virtuelles engendrées par la technique. De ce point de vue les technologies informatiques sont extrêmement riches en nouvelles données.
Si je pouvais sortir ces travaux en grand format, ce serait peut être sensiblement différent, bien que je n'en sois pas si convaincu; car certaines images souffrent d'être agrandies. Ce qui serait originale par contre ce serait de donner à ces images une épaisseur virtuelle qui leur donne une sensation de profondeur irréelle. D'autre part je crois que ces œuvres dépréciées aujourd'hui trouveront des amateurs dans quelques années. Les nouvelles technologies évoluent tellement vite que nos systèmes d'impression et de résolution seront dépassées dans peu de temps , ces images seront alors recherchées comme des images appartenant à la première génération informatique, ont les recherchera demain comme des objets rares. D'autre part on pourra sans doute demain proposer des séries complètes d'œuvres informatiques elles seront projetés sur grand écrans au gré des désirs des nouveaux amateurs d'art qui disposeront de nouveaux instruments ludiques pour les visualiser. On peu faire confiance en nos descendant le futur récupérera sans complexe l'arsenal artistique du présent; ce qui est méprisé aujourd'hui trouvera des défendeurs ou des amateurs convaincus demain.

Tu es particulièrement optimiste…

Pas particulièrement, je crois que cela se passe généralement toujours comme ça d'un point de vue historique , les hommes ont de grandes capacités d'adaptation, mais aussi des capacités de renouvellement assez développées. Ce qui change à une vitesse foudroyante, ce sont les technologies, les habitudes standards des humains sont elles plus difficiles à changer ou à se modifier, car l'homme à toujours fait de la résistance face au changement, c'est son instinct de préservation qui l'incite à agir ainsi. Il faut en générale une génération ou parfois deux pour assimiler les changements de comportement d'une époque à une autre.






























































PEINDRE A L'ECART




Il s'est presque complètement retiré du monde de la peinture pendant un certain temps. Durant cette période, il côtoyait toujours des peintres car il vit par commodité dans une cité d'artistes ; mais il s'était mis à l'écart des autres artistes. Il ne s'intéressait presque plus d'ailleurs au monde de l’art. Ce qui l'intéressait c'était exclusivement les choses banales de la vie quotidienne. Il s'était mis à écrire et cette diversion lui avait permit de s'absenter du monde de la peinture .Quand il se remettait à peindre il avait l'impression "de peindre à l'écart". Peindre à l'écart cela voulait dire peindre sans volonté de faire une œuvre. Durant cette période, il avait le sentiment que la peinture lui échappait, il s'étonnait de ne pas être vraiment troublé par cette désertion.
Il avait réussit à revenir à la peinture par l'obligation qu'il s'était fait de nourrir sa famille, il s'était remis à peindre uniquement pour subsister financièrement. Il avait été étonné de s'apercevoir que l'on pouvait peindre sans inspiration, sans états d'âmes et sans but avoué de faire une œuvre. La peinture pouvait devenir aussi banale que la vie quotidienne; c'était pour lui une expérience nouvelle.

Quand tu dis qu'il est possible de créer une œuvre sans passion et sans états d’âmes, ça veut dire quoi?

-JS :En général lorsqu'on est un jeune artiste, on a besoin d'inspiration, on pense au génie, on s'imagine qu'il faut être dans une disposition particulière pour peindre. Je me suis aperçu durant la période ou je peignais à l'écart que tout cela n'avait pas d'importance, on peu peindre sans état d'âme ou sans disposition particulière cela n'affecte pas la croissance explicite de l'œuvre ou du travail.

Cela contredit en partie une certaine forme de relation que tu avais instauré à une certaine période entre le travail artistique et la recherche d'une transparence intérieure.

-JS : C'est vrai, mais seulement en partie. En fait la recherche d’une transparence liée à l’art et fondée sur une éthique existentielle de la création, cela correspond à une autre période de ma vie, une époque peut être très radicalement différente de celle que je vis à présent. D'une certaine façon je peu atteindre aujourd'hui un des objectifs que je m'étais fixé à une autre période de ma vie de peintre sans parvenir à l’atteindre, cela consiste à isoler la matière peinte des émotions. Aujourd'hui je peu peindre d'une manière détachée, sans émotions, sans souci de conquête intérieure, je peu peindre sans être prisonnier d'une quête spirituelle, seule m'intéresse le simple rendu pictural. C’est peut être mieux ainsi .Je ne sais pas combien de temps cela va durer, car malgré tout je subi quand même l’atteinte de la peinture. Je la subi surtout comme – artiste producteur – car ma démarche aujourd’hui s’est surtout adaptée à mes nouvelles nécessitées économiques.
J’ai du rendre ma peinture plus lisible, pour qu’elle s’adapte au marché de l’art. Cela n’est pas dépourvu d’intérêt, mais l’intérêt n’est plus le même que lorsque j’étais en pleine exploration des origines.
Ma vie est ailleurs..



Sunday, February 05, 2006

JS
LA QUËTE IMMOBILE
Carnet de route d'un peintre égaré dans la splendeur du temps
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- L’art moderne ressemble à une tentative de sainteté-
Jean Paulhan









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